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mardi 7 mars 2017

Sberbank: quand la plus grande banque ne reconnait pas la légalité russe



Bien que, en mars 2014, la Crimée et Sébastopol aient été rattachés à la Russie et que le Président vienne d'adopter un oukase reconnaissant la validité des passeports délivrés par les Républiques de Donetsk et Lugansk sur le territoire de la Fédération de Russie, H. Gref, à la tête de la banque publique la plus importante de Russie, la Sberbank, refuse de reconnaître ces territoires et ces documents.

Pourquoi la légalité russe ne semble pas concerner la Sberbank et H. Gref?


La Sberbank est la principale banque de Russie. Fondée en 1841, elle est aujourd'hui présente dans 83 des 85 entités fédérées russes, 70% de la population utilise les services de la Sberbank, elle concentre 46% des dépots, 38,7% des crédits accordés aux personnes physiques et 32,2% des crédits accordés aux personnes morales. 

C'est aussi une banque dont l'actionnaire principal est l'Etat, la Banque de Russie détenant à ce jour 50% + 1 action. 45,6% du capital est détenu par des personnes morales non résidentes, 1,5% par des personnes morales résidentes et 2;90% par des investisseurs privés.

En 2007, Hermann Gref est nommé à la tête de la Sberbank à la place de A. Kazmine qui glisse vers la Poste. En 2013, le journal Forbes affirme qu'il est dans le top 5 des managers les plus chers de Russie avec 15 millions $.

Dès 2014, la position de H. Gref est claire: il maintient les bureaux de la Sberbank en Ukraine, mais ne travaille pas ni en Crimée, ni à Sébastopol (voir notre article de 2015 ici). Et cette position est constante, malgré les critiques, notamment des habitants de ces régions russes qui rencontrent des difficultés. L'argument avancé est que Gref ne veut pas se retrouver sous sanction. Et si la Sberbank avait publié, il y a peu, une annonce affirmant l'ouverture prochaine de succursales dans ces régions, elle fut rapidement enlevée et l'information officiellement démentie. 

Rappelons, que 45,6% du capital est détenu par des investisseurs étrangers, que la Sberbank a accès aux marchés boursiers de Francfort, Londres et aux Etats Unis. Donc, le fait qu'il s'agisse d'une banque publique qui a des obligations envers les habitants du pays est évidemment secondaire face à ces réalités.

On notera toutefois que d'autres banques, elles, fonctionnent sur ces territoires, notamment la filliale ukrainienne de la descendante de la Sbercasse encore soviétique, RNKB, qui facture aux criméens un coût d'opération dépassant toutes les limites acceptables, ou encore d'autres banques russes privées comme Alfabanque ou ayant un capital étranger comme Raiffeisen Bank. Mais la Sberbank, elle, non.

Et si H. Gref peut en toute impunité traiter de cette manière les habitants de Crimée et de Sébastopol, que ne peut-il pour ceux du Donbass. L'on ne parle pas des bureaux de la Sberbank qui ont été fermés en même temps que ceux des banques ukrainiennes sur les territoires des républiques de Donetsk et Lugansk. Non, l'on parle de l'application de l'oukase du Président russe portant reconnaissance temporaire des documents officiels délivrés par les autorités de ces républiques sur le territoire de la Fédération de Russie (voir notre analyse ici). Acte incontournable, notamment pour assurer le paiement des salaires, autrement qu'en liquide dans une enveloppe.

Or, un habitant de Gorlovka, A. Petrov, a tenté d'ouvrir un compte à la Sberbank pour obtenir une carte de crédit. Un refus catégorique lui a été opposé, son passeport délivré par les autorités locales du Donbass n'a pas été considéré comme valable par les services de la Sberbank, qui lui a demandé de fournir un passeport ukrainien. Il a répondu qu'il n'en possédait pas d'autre et ne reconnaissait pas d'autre république.

La position de H. Gref pourrait être acceptable s'il s'agissait d'une banque privée. Il pourrait alors, en tant que dirigeant, décider librement de la politique commerciale de la banque, sans autres considérations que son intérêt propre et ses positions politiques. Mais ce n'est pas une banque privée, c'est une banque dont le capital reste majoritairement public, malgré les différentes tentatives de Gref de privatiser totalement l'institution financière. 

Depuis 2010, H. Gref plaide en faveur d'une privatisation du capital de la Sberbank. En 2012, D. Medvedev signe un oukase visant à diminuer la participation de l'Etat dans le capital de la Sberbank et 7,6 % du capital est vendu. Mais par la suite, la Banque Centrale a déclaré qu'elle ne vendrait pas d'autres actions et, alors, H. Gref était d'accord. Mais en 2015, peut être en raison du régime de sanctions et du rattachement de la Crimée, il change radicalement de position et plaide pour une privatisation totale de la Sberbank. Sans être soutenu par le Gouvernement. 

Toutefois, sa position est claire et ce qui est surprenant est qu'elle n'a toujours provoqué aucune réaction officielle, laissant supposer que les oukases présidentiels, qui sont des actes normatifs obligatoires sur l'intégralité du territoire de la Fédération de Russie, n'auraient finalement que valeur de  ... recommandation? A moins que la Sberbank ne ressorte pas de la juridiction russe. Ce qui peut être un exemple pour les autres entreprises publiques.


5 commentaires:

  1. quand est-ce qu'on va virer ce type, sinon je sens que je vais être obligée de changer de banque...

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  2. COMPLEMENT: Hier en fin de journée, la Sberbank a annoncé qu'elle allait prendre en charge les personnes munies d'un passeport DNR LNR. C'est une excellente nouvelle!

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  3. En effet, c'est une excellente nouvelle et, il est normal que la Sberbank se plie aux décisions du Président Poutine.

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  4. Poutine ferait bien de s'inspirer d'un certain Philippe le Bel ...

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  5. bonjour je suis possesseur d'une centaine de titres russes emprunts -obligations d'Etat de 1907/1908 souscrits par le Tsar et je demande le remboursement de ces titres vu que la justice européenne a reconnu la validité de la requête soviétique comme quoi la célèbre basilique de Nice (batie au temps du tsar)appartenait bien à la Russie au nom de la continuité des Etats (même si le nom a changé)
    Donc, si la Russie revendique cette basilique, elle doit de facto reconnaitre AUSSI les dettes du tsar (logique)
    de plus, la question de l'immunité de juridiction soulevée par la Russie pour refuser d'honorer sa dette, est une escroquerie indigne d'un Etat de Droit et un artifice unilatéral (ukase) pour se défaire de ses obligations
    il ne s'agit pas de dettes d'Etat à Etat comme lors de l'aumône versé en 1998 après action de mr Juppé, mais de dettes d'Etat à particuliers selon l'intangible notion d'obligations d'Etat (ce qui veut tout dire!)
    la Russie peut et doit payer et toute autre "salade" pour faire croire qu'elle n'a plus rien à voir avec ces emprunts est de la haute trahison étatique et devrait lui être refuser tout emprunt à venir tant qu'elle ne s'est pas mise à jour de ses dettes
    Je reste cependant totalement favorable à minorer largement le total reconnu par plusieurs hedge funds homologuées , mais au moins que la Russie accepte ce deal tout en sa faveur
    J'attends des avis sérieux et crédibles
    cordialement
    pierre d'En Marti

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